Dans
l’esprit
humain
la
réalité
est
ce
qui
existe,
ce
qui
est
constaté,
ce
qui
se
dégage
de
toute
subjectivité
et
que
l’on
ne
peut
confondre
avec
un
produit
de
la
pensée
ou
de
l’imagination.
Bref,
elle
passe
pour
ce
que
l’on
peut
considérer
comme
incontestable.
Nous
l’associons
par
habitude
à
l’utilité
et
à
la
doctrine
qui
en
découle
(utilitarisme),
faisant
de
l'utile
un
principe
de
vie,
de
bonheur,
mais
aussi
de
connaissance
«sérieuse»
où les actions sont divisées en bonnes et mauvaises, les choses également.
Pourtant,
ce
que
l’on
oublie
c’est
que
le
cerveau
est
une
incroyable
machine
de
décodage
automatique
traduisant
l’information
des
sens
qu’il
reçoit
en
formes.
Par
exemple,
concernant
la
vue,
un
signal
électrique
est
transmis
par
la
rétine
à
l’arrière
du
cerveau,
mais
jamais
le
cerveau
lui-même
n’est
en
contact
avec
la
lumière
ou
l’extérieur.
Par
ailleurs,
on
sait
que
le
corps
humain
que
nous
associons
au
principe
de
réalité
et
de
tangibilité
est,
sur
le
plan
atomique
de
l’infiniment
petit,
caractérisé
par
l’absence
de
matière
sachant
qu’en
dehors
de
l’infime
masse
du
noyau
le
volume
de
l’atome
est
constitué
de
99,9
%
de
vide.
En
fait
le
cerveau
nous
leurre
en
décodant
le
message,
puisqu’il
élabore
pour
nous
une
image
matérielle
et
charnelle
faisant
passer
du
vide
pour
du
plein,
ainsi
que
les
frétillements
perpétuels
et
subtils
des
atomes
pour
de
la
densité compacte.
La
vérité
est
que
nos
corps
sont
pris
à
chaque
nano
seconde
dans
une
danse
incessante
du
vide
atomique
dont
nous
n’avons
heureusement
jamais
conscience.
D’ailleurs,
peut-être
que
si
nous
en
avions
conscience
nous
ne
le
supporterions
ni
physiquement
ni
psychologiquement.
Ce
que
nous
nommons
la
«
réalité
»
est
en
fait
une
soupape
de
sécurité
trouvée
par
l’esprit
pour
que
nos
vies
perdurent
et
réalisent
ce
qu’elles
sont
venues
faire
sur
cette
Terre
pour
de
mystérieuses
raisons,
mais
elle
n’est
pas
le
Réel
incommensurablement
plus
large,
un
Réel
mobilisant
probablement
des
millions,
des
milliards
(ou
plus)
d’angles
de
vue,
au
regard
desquels
il
n’y
a
même
plus
de
distinction
à
faire
entre
objectivité
et subjectivité, pas plus qu’entre intérieur et extérieur.
Ce
que
nous
comprenons
du
monde
par
nos
sens
est
régi
par
le
cerveau
générant
pour
notre
confort
un
consensus
physiologique
acceptable,
c’est-à-dire
à
bonne
température
pour
notre
condition
humaine.
En
ce
sens,
admettons
tout
bonnement
que
nous
passons
chaque
minute
de
nos
existences
à
entretenir
une
sorte
d’imaginaire
de
nous-mêmes,
le
comble
étant
que
c’est
précisément
cet
imaginaire
que
nous
nommons
réalité...
Tel
est
pris
qui
croyait
prendre
!
Par-dessus
le
marché,
nous
conditionnons
nos
existences
sociales
autour
de
cet
«imaginaire-réalité
»
que
nous
enseignons
dans
nos
écoles
et
transmettons
aux
générations
suivantes
comme
la
vérité
absolue,
comme
un
gage
de
progrès
de
l’humanité, d’excellence culturelle et d’équilibre en matière de comportement psychosocial.
Après
tout,
rien
de
mal
dans
ce
processus
culturel
et
si
humain.
Non,
il
n’y
a
rien
de
choquant
à
cela,
sauf
lorsque
ce
principe
de
réalité
s’impose
dans
une
civilisation
en
diktat
souverain
et
hégémonique,
et
qu’il
prend
en
otage
des
populations
condamnées
à
se
soumettre
à
ce
principe
de
réalité
matérialiste
ou
bien
à
vivre
ce
dernier
en
opposition
perpétuelle
avec
d’autres
principes
dont
elles
ressentent
pourtant
l’importance
et
la
nécessité.
Demeurons
donc
attentifs
à
faire
la
distinction
entre
l’idée
humaine
de
la
réalité
et
le
Réel…
Le
Réel
n’est
pas
la
réalité, loin s’en faut !
Si
la
réalité
renvoie
dans
nos
esprits
occidentaux
notamment
à
ce
qui
peut
se
toucher,
se
compter,
se
quantifier
et
se
chosifier,
le
Réel
quant
à
lui
ne
peut
en
aucune
façon
être
réduit
à
cette
vision
physique
et
matérialiste
de
l’être
au
monde.
Confondre
les
deux
équivaut
à
regarder
le
monde
par
un
trou
de
serrure
et
s’imaginer
connaître
l’environnement
extérieur.
Certes,
le
Réel
englobe
cette
vision
dite
«
réaliste
»,
mais
cette
dernière n’est qu’une qualité d’attention parmi d’autres, elle n’est qu’un (dé)codage surgissant d’une infinité de possibles.
Ne
prenons
pas
le
principe
de
réalité
issu
de
nos
habitudes
culturelles
et
de
nos
formatages
pour
le
Réel
qui
est
infiniment
plus
vaste
:
il
s’agit
de
deux
choses
emboîtées,
mais
distinctes.
Il
suffit
de
prendre
un
peu
de
recul
intérieur
pour
comprendre
cela.
Prenant
le
temps
de
ce
recul
sacré
qui
est
probablement
la
forme
la
plus
pérenne
de
l’intelligence
humaine,
nous
ouvrons
alors
notre
pouvoir
de
dire
et
de
faire
d’autres
paradigmes qui appellent en retour de nouvelles visions du monde, de soi-même et de possibles autres dimensions.
«L’homme doué d’un esprit philosophique a le pressentiment que derrière la réalité dans laquelle nous existons et vivons,
il s’en cache une autre toute différente, et que, par conséquent, la première n’est, elle aussi, qu’une apparence. »
Friedriech Nietzshe
(L’origine de la tragédie)
©
La réalité n’est pas le Réel.
Nombre de pages : 1
Parution : avril 2016